Le rendez-vous estival annuel qui perdure depuis plus de 25 ans sur le massif des Arbailles, ne connaitra pas sa plus forte affluence pour cette session 2023. Néanmoins, les habituels motivés sont présents et ont hâte de reprendre les explorations en cours. Nous totaliserons treize spéléos sur les deux semaines du camp, dont les amis qui passent nous voir régulièrement.
Depuis quelques années nous essayons de clôturer les chantiers des grands réseaux explorés par le collectif de la Taupe, il faut bien l’avouer par manque de bras et de motivation. De fait nous nous concentrons sur les découvertes plus récentes de la zone Ihatia, c’est-à-dire les gouffres du Bidon et du Bois de Cerf découverts tous les deux, un jour enneigé de l’hiver 2018. Pascal a néanmoins planifié sur ce camp une troisième séance de dépollution dans la Taupe, car il reste encore bien des détritus à remonter.
Pour rappel, le réseau du bidon devenant désormais très sélectif, nous cherchons depuis bientôt deux ans, une entrée alternative avec un accès plus aisé à ce réseau. Après le mirage du gouffre du Fakir, l’équipée de cet hiver a permis de repérer en forêt deux points chauds dont les entrées ont été aussitôt élargies. Le trou des Senteurs se referme malheureusement assez rapidement et tous les espoirs se portent désormais sur le trou de l’Erable dont la dernière vision au printemps nous laisse un espoir de continuité. En parallèle, nous poursuivons le rééquipement du SO104, découvert en 1990 par nos amis du GSG et qui est situé dans l’axe du développement du bidon.
Et nous n’oublions pas évidemment le Bois de Cerf qui, s’il ne se laisse pas facilement déflorer, est toujours aussi prometteur et peut rejoindre le réseau du bidon.
La semaine précédant le camp a été pluvieuse, la première matinée également mais le beau temps arrivant se maintiendra majoritairement pendant toute la durée du camp. Après divers désistements et reports, nous ne sommes finalement que trois à ouvrir les hostilités : Pascal, Adrien et Olivier. C’est suffisant pour tirer des seaux à l’Erable.
Le trou de l’Erable
Lors d’une première journée, le P10 est enfin entièrement vidé et nous ouvrons le ressaut de quatre mètres entrevu au printemps. Sur le chemin du retour, des tapis de girolles nous tendent leurs corolles. Pascal, plus mycologue que nous, nous fera découvrir la savoureuse coulemelle. Le soir Thibaut et Hélène arrivent à propos pour profiter de cette savoureuse poêlée. C’est avec une équipe de quatre terrassiers, partiellement renouvelée avec Jean-Louis et Hélène que nous revenons le lendemain. Il faut désormais un « tireur de seaux » supplémentaire en relais au fond du puits de dix mètres. Le R4 est élargi, on doit remonter de plus bas les débris tombés de plus haut ! La spéléologie d’exploration, sur de nombreux aspects, est assez « shadokienne » - pour les non boomers, merci de consulter la référence sur internet. A l’extérieur, le tas de déblais est impressionnant, nous avons tout de même vidé près de quatre mètres de hauteur de remplissage.
Une troisième séance se fera malgré nous deux jours plus tard, car nous connaissons des problèmes de fonctionnement avec les deux perforateurs du club. Le R4 enfin vidangé, alors que nous pensions être sur une tête de méandre, nous aboutissons sur un plancher de calcite et la suite à creuser est très basse et peu large. Il faut attendre la deuxième semaine pour que Fabrice, Audrey, Sébastien et Olivier y retournent une dernière fois.
Alors espoir ou pas ?
Dans l’exiguïté de la niche terminale, les dernières pelletées de terre sont remontées. Au piochon, Olivier s’acharne en vain sur un plancher de calcite, centimètre par centimètre, alors que les camarades restés en surface s’impatientent. En guise de conclusion Fabrice jette un dernier coup d’œil à plat ventre et ressort avec un espoir déçu. Pourrons-nous éliminer ce plancher stalagmitique ?
Nous décidons par dépit de remonter tout le matériel de déblaiement au cayolar.
Le gouffre SO 104
Thibaut et Adrien ouvrent le ban avec l’élargissement de l’entrée du P35 qui se situe dans la première partie du réseau. L’accès avait été élargi en 1990 par des amis spéléos indubitablement très minces et peut-être grossophobes. Ils y retournent dès le lendemain et abandonnent cet objectif pour progresser directement vers le fond ; Thibaut passe seul l’étroiture sur laquelle nous avions précédemment bloqué et fouille rapidement le fond. La description qu’il nous fera ne met pas en évidence de suite (!?).
Deux jours plus tard, Olivier décidément motivé par ce gouffre, repart seul au SO104. Le planning des désobstructions étant des plus contraints, il n’est plus question d’aller élargir le fond car son perfo est demandé au Bois de Cerf. Donc fin de l’élargissement du P35 et équipement de la tête de puits. Jean-Louis le rejoint dans l’après-midi, après avoir couru 25 km du cayolar jusqu’à ….Tardet et déjeuner en terrasse avec Pascal au restaurant des Arcades. Toujours en forme notre Jean-Louis national !
Le puits de 35 mètres est prêt à descendre mais il se fait tard et comme nous voulions le topographier, ce sera fait le lendemain avec Pascal.
Il faut installer deux déviations dans les dix premiers mètres étroits puis le puits s’élargit jusqu’au fond. Une partie de la paroi est lisse alors que l’autre côté en demi-cercle est concrétionné. Nous voilà enfin au fond pour vérifier les données de nos prédécesseurs qui malheureusement se confirment : la suite est un méandre étroit de quinze centimètres de large, légèrement soufflant. Il n’y a rien à attendre de ce côté. La topographie du puits est réalisée et nous sécurisons l’entrée du puits par un filet de cordes pour prévenir la chute d’éventuels maladroits ou distraits maintenant que celle-ci s’ouvre largement dans la galerie.
Nous n’aurons plus assez de temps en deuxième semaine pour mener l’élargissement de l’étroiture au fond. (qui court sur une dizaine de mètres d’après Thibaut) Sébastien et Olivier y retournent pour réaliser la topographie d’une partie du réseau jusqu’à la fameuse étroiture. Comme il faut également sortir le matériel laissé au fond, la remontée au cayolar se fera chargés comme des baudets.
Le gouffre de La Taupe
La grosse journée de dépollution dans la Taupe est prévue le lundi précédent le 15 aout. L’équipe des courageux participants est constituée d’Audrey, Fabrice, Pascal, Sébastien, Mathieu et Darioush qui nous ont rejoint. Un groupe plus consistant aurait été nécessaire pour dépolluer le bivaouc à -600 m mais il y a déjà un volume suffisant de déchets à récupérer -450 m dans la salle des Llaminaks. A peine posé le pied à terre en bas de l’imposante verticale de 140 m que tous s’acharnent à faire rentrer dans sept kits, un amas d’ordures troglodytiques, n’ayant à priori pas vu le soleil depuis des lustres - vieilles cordes glaiseuses, amarrages oxydés, couvertures de survie déchirées, matelas mousse salis, vieux kit percé, sacs poubelles dont on ne veut plus savoir ce qu’ils contiennent… Pascal en voulant photographier et immortaliser la scène, chute dans l’éboulis et heurte violemment un bloc avec le pied. Il remontera avec une douleur lancinante. Le lendemain, ses projets seront contrariés par un orteil qui a doublé de volume et est devenu tout bleu.
Durant cette épopée, Sixtine, encore un peu novice pour se frotter à ce type d’intense expédition et Olivier, fâché avec le sélectif Popoc, s’activent à diverses taches de nettoyage et de préparation au cayolar. Dans l’après-midi Olivier part dans une zone accidentée au dessus d’Alcay, pour repointer d’anciens trous. Il est accueilli par les fermiers propriétaires du terrain, ne trouve pas les trous et finit en soirée kidnappé dans la ferme par un commando de basques un peu trop sympathiques. Bref, après moults verres de Ricard, il remonte de nuit et dans le brouillard (complet) au cayolar. Du moins c’est ce qu’il raconte car en haut il n’y a qu’une légère brume. L’équipe de la Taupe est déjà rentrée, ils auront fait vite avec un TPST de 8H, aller-retour à -450.
Généreuse, Sixtine a eu la bonne idée de préparer le diner pour palier au défaut du prospecteur gravement anisé.
On dine et on fête cette journée avec allégresse. Un moment de bonheur collectif qui s’ajoute à notre collection mémorielle Arbaillesque.
Le gouffre du Bois de Cerf
Pascal et Jean-Louis retrouvent ce gouffre agréable dès le premier mardi pour poursuivre les élargissements au fond à -170. Hélas, le perforateur du club qui ne tourne pas à son régime optimal contrarie nos objectifs. Grosse inquiétude pour la suite du camp d’autant plus que le lendemain, notre deuxième perfo, ne démarre pas. La loi des séries.
C'est finalement le samedi que Pascal, Jean-Louis accompagnés d’Olivier redescendent avec deux perforateurs. Deux chantiers d’élargissement sont menés tambour battant : un au fond et l’autre sur les quelques petits puits qui chatouillent encore les plus enrobés.
Le P8 est élargi. Alléluia !
Le Hilti du club ressuscite soudainement par l’intervention du Saint-Esprit. Gloria !
Trouons allègrement les passages étroits pour de futurs élargissements !Le lendemain, Olivier et Sébastien qui vient de rejoindre le camp, ré-élargissent le P15 et le méandre terminal, les résultats ne sont pas tous satisfaisants, il faudra retoucher.
Pour l’assomption, Fabrice, Mathieu (notre invité Charentais) et Sixtine poursuivent la désobstruction. L’équipe est amputée de Pascal qui lui, n’a pas voulu amputer son orteil bleu de méthylène. Sixtine est initiée aux techniques d’élargissement. Elle repartira du camp super motivée par l’exploration. Nous espérons revoir parmi nous cette future archéologue.
Finalement, en fin de camp, journée ultime pour Fabrice, Sébastien et Audrey qui font un boulot intense et efficace en alternant les tâches. Ils progressent de cinq à six mètres. Une nouvelle fois, un écho annonce un futur élargissement ou puits sans que l’on puise encore en évaluer la distance. Au moins, le Bois du Cerf reste prometteur même s’il se fait attendre.
Quoi d’autres sur ce camp ?
Ces foutus chevaux qui nous ont cabossé à plusieurs reprises les voitures et affectionnent particulièrement les essuie-glaces. Allez comprendre.
La visite insistante du propriétaire d’un certain poulain qui avait en son temps, voulu bien malgré lui, explorer le gouffre Etchar. Ca lui a coûté la vie. Au poulain pas au propriétaire, on n’est pas si méchant.
La visite rituelle de nos amis grenoblois Jackie et Jean-Louis qui descendront une fois de plus, malgré leur âge avancé, le gouffre de Betxanka.
On aurait été peiné de ne pas voir cette année Thomas, Valérie et David. Ils étaient présents le 15 aout pour poursuivre l’élargissement d’une cavité proche du gouffre Charlotte. Audrey en a profité pour les accompagner.
Ce n’était pas Pâques mais Adrien a fait une razzia au magasin d’usine Lindt à Oloron sur le trajet aller. On n’a pas pu résister, on a bouffé le stock des vingt tablettes pendant le séjour.
Une recherche et un repointage du HE2 par Audrey, Pascal et Fabrice.
Une journée de prospection en surface par Olivier entre les zones SO, AL et CH, secteur totalement vierge de cavités. Et de fait, point de trou si ce n’est un nouveau sur la crète au-dessus de la zone SO. Reconnaissons qu’avec un râteau à une dent, on peut difficilement ratisser. Pour se consoler on admettra qu’il a fait de la première de surface ce jour-là, le relief et les épineux ne laissant pas imaginer l’antériorité d’une percée humaine.
Une partie de la nuit et de la matinée suivante, passés par Sébastien pour dicter oralement à Olivier les 1524 données chiffrées à 3 chiffres après la virgule, de la topographie du SO 104 pour les saisir sur un tableur. On a donc appris que quand l’export du DistoX vers le PC plante, il n’est plus possible de récupérer les données via le bluetooth. (Argh…)
A noter la visite de la grotte dite de Bête à Rame, dont l’évocation des concrétions est largement exagérée sur le descriptif de Karsteau.
L’inauguration de la nouvelle débroussailleuse du club.
Et toujours ces moments de retrouvailles et de convivialité. Vivement la prochaine.