Camp Ardèche avril 2019

Olivier Brunel
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Aven de la buseClassiques à gogo, ambiance festive et… « mise en situation »
Un voyage aller assez long pour les Brestois qui non contents d’habiter la fin de la terre, profitent du trajet pour faire des détours et du shopping. Ils passent le col de la Charade au ralenti sous la neige avant de redescendre assez tardivement sur l’Ardèche. Nous sommes donc treize à squatter chez Marie-Jo à Vallon Pont D’Arc. Le jardin se transforme en camping. Les nuits sont encore fraiches mais la météo de la semaine se révèle beaucoup plus agréable qu’annoncée. Nous ferons de la spéléo tous les jours, certains plus que d’autres. Les débuts sont laborieux. Certains s’entrainent à l’équipement, ce qui n’est pas forcément compatible avec le nombre.

Dimanche
Nous sommes à l’aven du Marteau et paressons comme des lézards sur le plateau en attendant l’équipement. Je fais profil bas après m’être coincé dans la première étroiture et bloque psychologiquement sur la 2ème plus sévère. Derrière celle-ci, Antony se lance dans l’équipement du P55 quand je l’entends dire au loin : « Je ne me souviens plus comment on fait les nœuds » (Restons calme, tout va bien !) Le manque de mousqueton l’oblige à abandonner la dernière tirée. Il est tard, on remonte tous et reprenons le GR à travers la garrigue.

Lundi
Aven de la Buse. Céline et moi avons des vagues souvenirs d’une sortie rapide mais c’était sans compter l’inertie du groupe. L’équipement durera faute d’information précise, la grosse majorité du groupe s’arrête pour manger avant les étroitures pendant que Régis et moi tentons de poursuivre. Finalement seul Régis remontera les puits pour accéder aux belles galeries supérieures mais seul dans sa progression, il ne s’engagera pas plus loin. Je fais faire demi-tour au groupe car il est déjà tard.  Blanche, Corinne et Damien veulent poursuivre un peu mais n’iront pas plus loin que Régis. Ils prendront beaucoup de temps pour remonter (gestion sur cordes glaiseuses ?). Je m’apprêtais à redescendre les chercher quand j’ai enfin entendu Damien. Nous rentrerons trois heures après le premier groupe et personne n’aura vu les splendeurs d’Aragonite de la Buse. Le soir au repas on recadre donc, pour une meilleure gestion du temps et du groupe, les grosses sorties restant à venir. Jackie et Jean-Louis nous quittent.

Fontaine ChampclosMardi
Aven de Noël. On se lève plus tôt que la veille. Pour certains le grand puits de 90m est une première. Deux groupes sont créés pour limiter les attentes et décaler les remontées. Nous nous croiserons à divers moments à l’intersection des galeries. C’est un enchantement de voir ou de revoir la galerie blanche, la chauve-souris calcifiée, les grand gours… Remontée régulière sans attente, c’est un sans-faute et une énorme satisfaction pour tous. On ne rentre pas trop tard chez Marie-Jo qui nous abreuve du champagne familial.

Mercredi
Journée plus tranquille à mi-semaine. Les filles et Régis randonnent durant cinq heures dans les gorges de l’Ardèche. Les quatre autres font les courses et iront se jeter par la suite dans l’aven des Neuf Gorges. Descente et remontée en 2h30. On tient le rythme. Sortie restaurant le soir à Vallon avec les Bretons du CREPS :  Benjamin et Jean Baptiste.

Jeudi
Le « must » de la semaine : la traversée Despeysse – Saint Marcel. On récupère les clés, on commence à équiper Despeysse pendant que les autres font la navette avec la sortie. Nous sommes onze à descendre. Tartine qui trouve le rythme trop long à son gout remonte. Elle annonce qu’elle redescend la voiture à la sortie et nous y attendra jusqu’à 20H30. Le rythme est lent mais nous sommes dans les clous pour sortir avant 20h. C’est du moins ce que je pensais.

L’auto-secours
Arrivée dans les grandes galeries, Corinne semble souffrir. Elle a glissé dans le méandre précédent et aurait tapé le bas du dos. Sa pédale pendait et s’est accrochée alors qu’elle était en mouvement en opposition. Elle marche difficilement et ne peut se plier. Je décide néanmoins de poursuivre vers l’aval car une évacuation y sera plus facile. Le premier tronçon du trajet présente pas mal de vires et pose un problème pour la progression, il faut soulager Corinne, installer des rappels guidés. Il est 17H30 et nous n’avons pas fait le 10ème de la progression pour sortir. Nous envisageons un arrêt, commençons à installer le point chaud pour la reposer et je présente les différents scénarii au groupe. A ce rythme nous ne sortirons (si nous y arrivons) qu’au petit matin.  Corinne préfère continuer à avancer tant que c’est possible pour elle. On lui administre un anti inflammatoire. Le groupe se scinde en deux :  Blanche, Louise, Mélanie, Damien et Régis poursuivront sans trainer vers la sortie, à l’aide d’un plan schématique. Ils ont pour instruction de mettre le SSF en pré-alerte. Ils laisseront ouverts les cadenas de la grille intermédiaire et de celui de la sortie. Ils transmettront toute information sur le niveau de mobilité de Corinne et sur notre vitesse de progression. Nous planifions de sortir Corinne par nos propres moyens mais à cet instant je n’y crois pas car je sais que les passages en aval sont plus étroits et obligent à la contorsion.
Le premier groupe, pourtant anxieux de ne pas trouver le chemin de la sortie, repérera sans faille les flèches et signes salvateurs. Ils sont dehors à 20H50 et la brave Tartine est présente à la sortie. Elle appelle Judicaël Arnaud qu’elle connait, le SSF est mis en préalerte aussitôt.
Céline, Antony, Nicolas et moi restons avec Corinne pour l’aider à sortir. Nous la soulageons tant que possible dans la progression, mettant genoux et épaules à sa disposition pour lui faire franchir les obstacles, la portant parfois. Dans les vastes galeries plates, la progression devient plus régulière mais les parties basses s’annoncent, la douleur de Corinne est persistante. Les pauses s’accumulent, Corinne s’endort constamment, nous la forçons à se tenir éveillée. Nous nous tenons prêts à réinstaller le point chaud et à sortir pour lancer l’alerte. Cette foutue porte qui marque la fin de la partie étroite semble ne jamais arriver. Antony et Nicolas blaguent, Céline chante pour encourager Corinne. Elle serrera les dents jusqu’au bout et franchira la porte intermédiaire. Au-delà, elle peut évoluer debout, supportée par Céline et Antony. Nous sortons à 2H30 du matin dans les gorges de l’Ardèche et à notre grand soulagement, nos amis sont là à nous attendre. Nous aurons mis 16h30 pour faire la traversée dont 10H30 à supporter Corinne. Nous n’avons pas vu de secouristes, on va pouvoir lever l’alerte.

Aven des Neuf GorgesLe secours
Malheureusement, il en est autrement. L’alerte a été lancée par le SSF à 22H30, 15 pompiers sont postés à proximité de l’entrée et 11 spéléos du SSF se lancent à 0H50 du matin dans la traversée à partir de Despeysse. (!?) Si l’on résume, il y a une forte agitation sur le plateau et sous terre alors que nous sommes sortis en bas des gorges. Nous nous préparions à rentrer à Vallon avec Corinne pour la faire dormir avant d’aller voir un médecin mais désormais nous suivons les ordres des pompiers.  Il faudra encore attendre 1 heure pour que les pompiers transfèrent Corinne dans le V.U. et l’évacue sur l’hôpital de Bagnols sur Cèze. Nous rejoignons les filles qui somnolent dans le minibus et rentrons. Nous nous coucherons entre 5h30 et 6H00. Corinne nous rappelle à 9H00 Le diagnostic est un peu flou, peut être un décollement de cartilage au niveau de la hanche. Quoi qu’il en soit, ils ne la gardent pas à l’hôpital et Antony part la récupérer.

Vendredi
J’avais planifié d’emmener Corinne pour l’encadrer sur l’équipement de la grotte nouvelle de Vallon. Vu les circonstances, ce sera le premier accroc au programme. Je pars avec Tartine déséquiper Despeysse. Pendant ce temps, le reste de l’équipe ira nettoyer le matériel dans l’Ardèche. Nous rentrons en fin d’après-midi à Vallon, tous bien fatigués par notre courte nuit. Cela ne nous empêchera pas de faire la fête le soir en présence de Corinne qui peut enfin s’asseoir.

Samedi
Nous avions planifié du canoë, mais à la demande générale ce sera de la spéléo (ils ne sont même pas dégoutés !!) On finit par du beau et du reposant : Fontaine Champclos. Antony, Mélanie et Louise tentent de ressortir par l’entrée naturelle à quatre pattes dans l’eau, mais le niveau de l’eau nécessite une apnée. Ils auront eu l’occasion de se mouiller. Personne ne semble pressé de sortir et tout le monde farfouille dans tous les coins. On a failli en oublier trois en bas. Il fallait bien finir la semaine par une anecdote.

Bilan
Malgré le secours, une grosse satisfaction d’avoir pu enchainer ces belles classiques concrétionnées. Pour la majorité, c’est une expérience en gestion de secours mais également en gestion d’exploration. Rappel : le kit de survie avec pharmacie est indispensable sur des courses longues avec des groupes conséquents. Merci aux brestois pour leur convivialité.

Participants : Céline, Blanche, Louise, Antony, Olivier (SCSH), Damien, Corinne, Régis, Mélanie, Nicolas (GASPAR), Jackie, Jean-Louis (FLT), Tartine (RAGAÏE)