Spéléo Canyon Arbailles pluvieuses

Charlotte, Pascal
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OX655Bois de Cerf – Bidon- Episode 7

L’automne n’est pas la meilleure période pour explorer les gouffres du massif des Arbailles. Cependant la passion de l’exploration ne se contrôlant pas, nous voici une fois de plus à l’entrée du gouffre du Bois de Cerf qui se développe sur 330m avec ses nombreuses ramifications verticales. Corinne, Thibault et Olivier D. m’accompagnent.

Première surprise, dans le P55 à -85m un actif arrive dans le puits par un petit méandre et agrémente la fin de la descente qui m’amène à -100. J’entends nettement l’eau cascader dans le Puits Pile Poil (P38) situé juste en dessous. L’objectif de cette journée est de topographier ce puits et d’y faire quelques photos au flash. En spéléo d’exploration, des objectifs on en a mais on les tient rarement.
Pendant que mes compagnons finissent de descendre tranquillement, je déroule la corde restée à l’abri depuis le mois d’aout et m’engage dans le P38. Dix mètres plus bas, force est de constater que les quelques litres par seconde qui viennent d’en haut suffisent à arroser toute la section du puits où je me trouve. Je remonte car faire de la topo et de la photo dans ces conditions, c’est l’hypothermie assurée.
Avec Thibault qui vient d’arriver nous décidons d’équiper la partie haute du puits qui part en méandre pour voir si une suite est possible. Celui-ci est couvert d’une épaisse couche d’argile qu’il faut enlever au piochon pour progresser sans glisser. L’humidité contenue dans cette enveloppe collante a corrodé le calcaire sous-jacent et une fine interface d’aspect sableux s’est créée entre l’argile et la roche. Ce qui fait qu’étonnamment l’argile adhère très peu à la paroi et s’en va par plaque.

J’installe plusieurs goujons et progresse laborieusement vers l’avant. Thibault me relaie jusqu’à un passage étroit, glissant et suspendu qui devient difficile à équiper. En face de nous, à deux mètres on peut observer la fin du méandre qui rejoint la partie inférieure du puits. Il n’y aura pas de prolongement de ce côté.

Thibault, déçu, me dit : « on a fait tout ça pour rien ! ». Je ne suis pas démotivé pour autant : en explo on ne gagne pas à tous les coups, il faut être patient et obstiné.

Fin de la partie pour aujourd’hui. Je ne voudrais pas dégouter mes camarades qui commencent à grelotter les pieds dans une vasque.

Au cayolar, nous retrouvons Charlotte, Jean-Alain et Christophe partis faire un canyon. Thomas et ses deux coéquipiers du Leize Mendi reviennent du Bidon toujours aussi gras. Ils ont continué l’explo du méandre à -130. La progression dans le mondmilch s’avère difficile et exposée.

Le lendemain le temps s’est nettement dégradé et l’eau commence à pénétrer dans les tentes des irréductibles campeurs. Au vu des prévisions météo, Charlotte, Christophe et moi avions, dès l’arrivée opté pour un endroit sec dans le cayolar. Prudent, ce matin Thibault fait le même choix. Quoi qu’il en soit, nous ne sommes pas velléitaires et nous repartons tous dans nos canyons et dans nos trous.
Histoire d’en découdre avec le mondmilch (inconscient !), Thibault préfère accompagner Thomas et Valérie dans le Bidon. Corinne, Olivier et moi redescendons dans le Bois de Cerf.

Je décide d’équiper le Puits Pile Poil (le 3P) hors crue. J’effectue un pendule quelques mètres sous la tête de puits et réussit à me bloquer grâce à ma goutte d’eau crochetée sur une arête qui marque la limite de la partie arrosée du puits. Naturellement pendant que je perce pour installer un fractionnement la goutte d’eau ripe et j’atterris dans l’actif. Plus de peur que de mal. Cette fois la corde est bien placée et nous pouvons accéder au sec à la base de ce beau volume. Nous faisons rapidement la topo avec Olivier pour qui c’est une première. Le fond est prometteur car il se poursuit par un petit puits-méandre qui est presque pénétrable et l’on peut voir un prolongement quelques mètres plus loin. Avec l’installation du pendule la corde est devenue trop courte de deux mètres et c’est avec précaution que nous la laissons pendre à la base du puits : il ne faudrait pas qu’elle s’accroche sur une aspérité en la lâchant. Pas question de moisir ici.
En remontant je m’aperçois que le méandre équipé la veille avec Thibault se prolonge vers une belle lucarne que nous ne pouvions pas voir du haut. Finalement « nous n’avons pas fait l’équipement pour rien » car il nous permettra d’atteindre l’ouverture.

Bois de Cerf, puits Pile PoilDehors la tempête fait rage. Le retour se fait sous des trombes d’eau. Le sol de la forêt devient spongieux. En arrivant sur l’alpage, c’est pire : la pluie propulsée à l’horizontale par le vent nous cingle le visage et rend inutile les ponchos qui se transforment en cerfs-volants et les chaussures respirantes qui se remplissent d’eau. Le chemin d’Héguilore s’est transformé en ruisseau qui se déverse plus loin dans la grande doline.
Ultima Arbailles.
Nous arrivons au cayolar trempés jusqu’au slip, presque en même temps que les canyonneurs.

Le lendemain une sortie spéléo collective est organisée sur l’OX655 équipé par Guillaume qui prépare son stage d’initiateur. Heureusement la cavité est (presque) sèche, ça nous changera de la veille. Nous nous retrouvons tous à la salle du chaos pour partager un déjeuner et immortaliser le moment avec une photo de groupe.
Ce compte rendu de la journée est aussi l’occasion de rendre hommage à Corinne, notre Brigitte Bardot Arbaillaise, qui au péril de sa vie a sauvé dans le dernier puits avant la sortie un crapaud dont les mensurations étaient particulièrement généreuses. C’est avec beaucoup d’amusement que nous l’avons attendue à la sortie du puits, Bobby (nom affectueusement attribué par elle) bien accroché à son épaule, et Guillaume venant en renfort pour le récupérer avant de le replacer dans une touffe d’herbe. Bobby a bien essayé de l’embrasser à mi-chemin pour la transformer en princesse mais Corinne a refusé catégoriquement préférant conserver sa dignité. Les bretonnes ne se laissent pas abuser si facilement !
Après ce rebondissement, c’est dans la bonne humeur autour d’une tartiflette que nous fêtons ce camp mémorable.
Dehors la tempête Amélie est en approche et certains campeurs en subiront les conséquences dans la nuit tout comme Christophe, Thibault C et Corinne, sur le départ Dimanche matin, bloqués par un arbre tombé sur la route les obligeant à faire demi-tour.

Partie canyon

Pour la deuxième année consécutive, une petite équipe de canyoneurs motivés (Christophe, Jean-Alain et Charlotte) s’est constituée en vue d’affronter les canyons basques en mode automnal. La météo annoncée était pourtant largement défavorable et il n’était pas certain que nous allions pouvoir faire quelque chose... Mais c’est sans compter un phénomène micro-climatique inespéré dans cette région que la pluie nous a épargnée durant 2 jours sur une plage 10h-17h tout à fait optimale pour notre activité. Une chance !
Jeudi, première journée, nous décidons de partir non loin de Saint-Jean-Pied-de-Port découvrir le canyon d’Harpea. De mémoire de canyoneur arbaillais, celui-ci n’avait encore jamais été descendu et c’est bien dommage car il s’agit là d’une bien jolie petite descente.

Après plusieurs tours et détours en voiture sous la pluie, nous finissons par trouver notre point d’arrivée. Cette perte de temps a finalement été bénéfique car le ciel s’est dégagé entre temps.
Nous entamons la marche d’approche mais finissons par rebrousser chemin car nous nous dirigions vraisemblablement vers la sortie du canyon. A proximité du départ nous trouvons enfin cette pente raide annoncée sur la topo amenant tout droit vers le sentier HRP... Vous avez dit journée laborieuse ? Ce n’est que le début.
A l’arrivée une superbe vue sur le massif avec des couleurs automnales des plus éclatantes. Malheureusement pas le temps pour la contemplation, la nuit nous guette et il ne faudrait pas trainer.
Nous descendons (crapahutons) quelque peu dangereusement vers le canyon le pifomètre en marche et nous arrivons enfin, non sans un certain soulagement, dans le lit du canyon. Entrée 1 ou entrée 2, peu importe le départ est donné rapidement.

CanyonUne première cascade avec une belle vasque où nous n’avons pas pied nous met directement dans l’ambiance. L’occasion pour Christophe de se rôder et moi de découvrir la combinaison étanche. Il faut bien avouer qu’elle apporte un certain confort thermique mais Jean-Alain, en néoprène, ne s’est jamais plaint du froid. A croire que nous sommes frileux…

Les cascades s’enchainent plus ou moins arrosées, plus ou moins dans l’actif avec un engagement limité de ma part quand Christophe décide d’équiper une descente sous gerbe. Mais ce que Christophe veut, Christophe a et les yeux de chaton n’y changeront rien. En même temps il avait raison, ce n’était pas sorcier mais les petites craintes ont la vie dure…
Arrivés au milieu du canyon nous découvrons avec plaisir une sympathique tyrolienne équipée en fixe de quoi s’amuser un peu, amusement exclusivement réservé à Christophe et Jean-Alain malheureusement.  De mon côté en équipant j’ai décidé que, par l’unique force de ma volonté, ma corde de 15m allait doubler de longueur. Sauf que ce genre de prouesse n’arrive que dans les films ! J’épargnerai les détails de ma minute suspension dans les airs avec une corde de rappel trop courte. Mon côté breton rempli de mauvaise foi vous dira simplement que je voulais donner encore une fois de ma personne pour avoir des choses à dire dans le compte rendu. Mais il faut bien avouer que cette péripétie me servira de leçon. Un bel exemple d’apprentissage par l’erreur qui se termine bien et sans fêlure de côtes Messieurs Dames !
Nous terminons finalement notre descente dans une longue marche au sec à travers les blocs et les arbres déracinés.

Petit arrêt à l’auberge préalablement repérée afin de reprendre une dose d’énergie liquide puis nous rentrons au cayolar sous la nuit. Au sommet nous voyons au loin les lumières de nos collègues spéléo et dans le rétroviseur les phares de Guillaume qui nous rejoint pour le reste du week-end. Timing parfait !

Vendredi, nous partons à 4 en direction de Larrau et du canyon de Zitziratzé. Christophe et moi avons une revanche à prendre suite à notre échappée lors de l’édition Toussaint 2018. Les cumuls de pluie de la nuit dernière nous posent tout de même question et c’est en apercevant au loin la cascade un brin tumultueuse de Phista que nous décidons à regret de faire demi-tour. Toujours là quand on a besoin d’une solution de repli, Harzubia contentera notre journée.

A défaut de jouer avec l’eau, nous avons joué avec les techniques : Jean-Alain s’est collé à la déviation humaine et moi au rappel décalé puis au rappel guidé mais pas avant d’avoir pris en pleine tête un coup de pied retourné digne de Jackie Chan de la part de Jean-Alain. Un passage obligé à Tardets et nous reprenons ensuite le chemin vers le cayolar sous des trombes d’eau. Tous les crapauds et autres grenouilles sont de sortie sur la route et il nous est bien difficile de les éviter face au peu de visibilité que nous avons. Au cœur du déluge nous pensons à nos spéléos qui devront revenir sous ces conditions à pied.