Neige et spéléo, février 2012.

Pascal Mathellier
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Sortie des lugesConnaissant l’épaisseur de neige qui nous attend autour de notre cabane, nous décidons de partir léger : seulement deux kits de cordes, trente amarrages, le groupe électrogène, un perfo, deux luges, de la nourriture pour quatre jours et nos sacs perso. Ma parole, le coffre est vide !

Rendez-vous avec Olivier et pique-nique devant le restaurant d’Aussurucq. Fait beau mais ça caille sec.

Arrêt dès cinq cent mètres d’altitude pour mettre les chaînes. La route est tellement verglacée qu’à peine le pied par terre, la voiture de Marco, qui doit vouloir retourner à Mauléon, se met  à glisser toute seule dans la pente. Production immédiate d’adrénaline. En courant, Marco réussit à ouvrir la portière, serrer le frein à main puis s’asseoir sur le siège et braquer pour arrêter le véhicule fuyant.

On finit par monter pépère et en forçant on arrive même à accéder aux abreuvoirs en haut de la piste. Marco qui a décidé de dompter sa voiture une bonne fois pour toute, s’engage sur le chemin très enneigé du cayolar. Après cinquante mètres la cabotine refuse d’avancer malgré les cent chevaux vrombissant qui font patiner une roue en projetant glace et cailloutis dans une spectaculaire gerbe blanche et grise.

Donc : plantage dans la neige, satellisation d’une chaîne qu’on met dix minutes à retrouver, retour aux abreuvoirs en marche arrière à côté de la voiture d’Olivier bien sagement garée depuis un quart d’heure au bord de la piste.

Trou souffleurOn charge les luges avec le matériel et on se la fait à la Jean-Louis Etienne en mode Arctique. Fraiche température dans le cayolar avec  -5°, et pourtant le soleil a chauffé la toiture. On charge le poêle avec le bois débité au mois de novembre et comme il nous reste trois heures avant la nuit polaire, on décide de chausser les raquettes et de monter dans la forêt vers la crête. Marc abdique au bout de dix minutes, les pieds gelés et retourne faire chauffer la baraque.

En montant le long d’une probable faille, matérialisée en surface par une colonne vertébrale faite de gros blocs alignés, on découvre un petit trou souffleur qui a fait fondre la neige. Olivier y emmanche son bâton de marche jusqu’à la garde, il pourrait y tomber. On met quelques branches mortes dans l’orifice pour le retrouver et je fais une photo. Bon, de toute façon ça n’est pas pénétrable.

Zone denneigéeEn février 2005 sous la neige qui tombait drue, Philippe et moi, avions repéré une petite zone dégelée qu’on avait pointé au GPS : « vu l’endroit, on peut pas se tromper, on retrouvera sans problème, pas la peine de gratter, on va pas se mouiller les mains, il fait trop froid, y a trop de neige, on voit rien, il va faire nuit, on reverra ça aux beaux jours ».

Depuis, sans photo, impossible de retrouver l’endroit.

Cette fois, après cinq minutes de recherche, je retrouve la zone déneigée comme il y a sept ans. Ca n’est qu’un simple tas de feuilles sèches et quelques cailloux. Rien de notable, à part l’absence de neige, pas de trou. Je commence à enlever la couverture végétale et découvre un petit puits qui se met à souffler : « mais il fait chaud là dedans ! ».

Avec Olivier, on décide de rentrer avant la nuit pour éviter les Liaminiaks et autres bêtes sauvages.
Soirée frileuse au cayolar où la température intérieure ne dépasse pas 5°.

Le lendemain matin, il y a de la glace sur les vitres - à l’intérieur. On ne s’attarde pas au petit déjeuner.


DésobstructionRetour au trou avec pelle, tire-fort, sangles, cordes et mousquetons. La désobstruction s’engage bien. On attaque facilement la terre qui n’a gelé qu’en surface, on dégage deux gros blocs avec des sangles et on fait le ménage à l’entrée du puits en faisant tomber les blocs dangereux. Ca n’a pas l’air profond.
Deux amarrages naturels plus tard et nous voilà au bas d’un puits de cinq mètres. Des blocs et de la terre bouchent le fond mais on peut voir un trou qui laisse passer le courant d’air chaud à travers l’éboulis sous jacent. On fait le ménage en entassant les plus gros cailloux dans une partie du fond de puits. Il faudrait un seau mais on n’en a pas, il faudrait un palan mais on n’a pas de quoi le monter. Je ressors et je vais voir, quinze mètres plus loin,  une autre entrée que je connaissais déjà, le trou souffle et exhale de la vapeur d’eau. Si on pouvait avoir ce courant d’air chaud au gîte… Cette zone semble intéressante, on reviendra voir cet été.

On grignote trois barres de céréales et on va faire une virée en raquettes sous la crête. Les traces d’un gros cervidé nous guident dans un dédale de rochers enneigés, il a certainement longé les escarpements à la recherche de l’herbe qui émerge au pied des blocs chauffés par le soleil. Ici la zone est broyée et très accidentée et on ne trouve aucun trou d’intérêt. Mais la vue est magnifique, on y voit une grande partie de l’Est du massif des Arbailles.
Je fais quelques relevés dans la partie supérieure d’un escarpement d’une vingtaine de mètre de hauteur qu’on ne peut pas descendre, pour une future prospection à sa base. Puis on rejoint tranquillement notre cabane de berger où le plat de lentilles-saucisses a fini de mijoter sur le poêle. Olivier fait son paquetage et nous quitte.

Le lendemain, la météo s’annonce très neigeuse pour les deux jours à venir. On préfère jouer la sécurité. Bonne idée car pendant la nuit, le vent a accumulé de la neige sur le chemin et en descendant la voiture se plante sur une couche durcie par le gel. Dégagement à la main, grattage avec les bâtons de marche oubliés par Olivier, décapage avec le cric, en jouant avec la hauteur des suspensions on finit par réussir à glisser une grosse branche sous une roue pour surélever  la Xantia. Tout finit bien avec un café et des beignets à Aussurucq.

Photos ici