Voici presque deux ans que nous parlions des canyons corses, sans parvenir à bloquer une date, ni à trouver un groupe pour organiser cette escapade aquatique sur l’Île de Beauté. La deuxième semaine des vacances de printemps, tardive dans la saison cette année, était favorable à l’organisation de cette expédition en 2014.
Le 2 mai, nous atterrissons à Bastia. Trente minutes plus tard, nous retrouvons Marc et Céline arrivés par bateau de Marseille en fin d’après-midi dans un des campings de la Marana à 20 km au sud de Bastia. Soirée de retrouvailles arrosée et préparation du programme de la semaine.
Le samedi, un petit canyon pour cette première journée, le ruisseau de Cippeto, présente un faible dénivelé (110m) et nécessite l’organisation d’une navette relativement courte de 5 km, idéal pour s’échauffer ou se familiariser avec la technique canyon. D’emblée, la recherche du départ du ruisseau à travers le maquis donne la tonalité générale des conditions d’accès aux canyons en Corse : c’est seulement vers seize heures que nous finissons par trouver le départ et entamons la descente. Mais après quelques minutes de progression, nous apercevons le chemin par lequel nous aurions dû arriver en rive gauche… Rappels, toboggans et petits sauts se succèdent dont une belle C55 fractionnée en deux tronçons. Nous parvenons à la tombée de la nuit au parking en bordure de la N.193.
Le soir nous revivons en live les descentes grâce aux deux GoPro qui nous ont filmé toute la journée.
Le lendemain, c’est une équipe complète de joyeux « canyonneurs » qui part vers la côte Ouest du Cap Corse pour aller parcourir le ruisseau de San Giuvanni. De Bastia, nous franchissons le Col de Teghime pour redescendre vers le pittoresque village de Nonza. Normalement, la D.233 doit nous mener au village d’Olcani d’où il faut prendre une piste menant au col San Giuvanni sur 3,5 km. Mais du village en question, aucune trace, il porte un autre nom ! Heureusement que le temps est sec, car la piste est peu carrossable, et nos deux véhicules de location flambant neuf ne sont pas des 4x4 ! Les indications du topoguide ne permettent pas de trouver le « petit sentier » qui rejoint le ruisseau en quinze minutes, car les virages en épingle à cheveux sont nombreux dans le secteur. Trop haut et en direction opposée à celle du canyon, le demi tour s’impose ! La descente à pied permet de repérer le fameux chemin. Effectivement, en 15 mn, nous sommes en haut du canyon !
La descente commence doucement par un plan incliné et des petites vasques, puis nous arrivons rapidement à la C35. Elle présente un faible débit mais reste néanmoins magnifique. Les autres cascades moins hautes, nous permettront de descendre à côté de l’eau et la profondeur des vasques autorisera sauts ou plongeons.
Arrivés au bas de la dernière C13, nous devons normalement sortir en rive droite par un sentier pour rejoindre la ligne de crête et les voitures en cinquante minutes. Mais aucune trace de chemin ! En poursuivant la rivière, nous savons que nous allons rencontrer le ruisseau de Viula en rive gauche et plus loin le pont génois qui nous permettra de quitter le lit de la rivière. Cette option, peut-être plus longue et qui nous oblige à remonter ensuite à pied la piste est jugée plus sûre. Les conducteurs sont naturellement chargés de cette tâche pendant que le reste du groupe sèche au soleil.
Le lundi, direction Cap Corse, mais côté ouest cette fois. Nous avons choisi le ruisseau de Mandriale pour cette journée ensoleillée. L’organisation de la navette entre Figarella et Mandriale est facile et rapide. Le départ par le chemin de randonnée menant à la Chapelle Saint-Jean est évident. Pourtant, au bout de quelques centaines de mètres, au moment où le sentier doit passer « sous une énorme bâtisse », les avis divergent : les uns, carte IGN en main veulent passer à gauche et les autres avec le descriptif souhaitent prendre à droite ! Finalement, la droite l’emportera mais le consensus se reformera autour du balisage rouge qui mène à la chapelle et au ruisseau. Paradoxalement, c’est au niveau du ruisseau que les choses se compliquent : les sentes à vaches qui permettent de remonter au dessus des cascades supérieures par la gauche du ruisseau en quinze minutes (dixit le topoguide) sont invisibles… Nous poursuivons donc le sentier de randonnée pratiquement jusqu’aux crêtes ! Vers 13h30, arrivés presque au sommet, nous décidons de manger et de descendre le 1er ruisseau qui se présentera en espérant que ce soit le bon !
La promenade sera longue et chaotique avant de rencontrer la moindre cascade. L’équipement en haut des premières verticales est inexistant, c’est là qu’il faut se rappeler que nous sommes spéléo et que toutes les techniques de descente ne se trouvent pas dans le manuel… Les amarrages sommaires déjà en place qui nous obligent à laisser des sangles entretiennent le doute (sommes nous au bon endroit ?) jusqu’au moment où presque quatre heures plus tard, nous rejoignons le chemin que nous avons traversé le matin. La sortie s’effectue par un petit sentier en rive droite qui mène directement au parking. En étudiant la carte IGN, nous pensons avoir parcouru un dénivelé d’au moins 400m. Une belle journée de rando-canyon !
Le jour suivant. Le ruisseau de Carcheto-Vadone est l’un des plus coté et engagé de la région, ce sera notre plat de résistance de la semaine. Cependant, à neuf, nous préférons shunter la partie haute du ruisseau de Carcheto qui selon le topoguide « présente quelques rappels mais reste sans intérêt avec de la marche dans une rivière très sale ». Comme pour les autres canyons, l’organisation d’une navette (11km) est indispensable. A Ponté Leccia, notre prenons la petite route de montagne qui monte vers Canaviaga. En comptant les virages depuis le bas, nous parvenons à repérer l’arrivée du ruisseau de Vadone dans une épingle à cheveux, et continuons jusqu’au départ de la piste près de l’église de Canaviaga. Pendant que les deux conducteurs redescendent déposer une voiture, le reste du groupe se restaure à l’ombre d’un gros rocher.
Cinquante minutes de marche sur un chemin évident et presque plat, et nous apercevons le pont génois qui marque la transition entre les deux ruisseaux et le point de départ de notre excursion.
Dix magnifiques cascades, entrecoupées de marche dans des eaux turquoises s’enchainent pendant près de 6h30. C’est vers 20 heures à la nuit tombante que nous apercevront la route. Encore une fois, le timing est serré et la navette retour se fera dans le noir.
Mercredi, les gorges du Golo dans le massif du Monté Cinto serviront de cadre à nos « ébats…quatiques » de la journée. Groupe de sept canyonnistes pour cette journée, les autres ont préféré faire une pause et un peu de tourisme. Après une rapide collation sur la place de l’église de Corscia, nous parvenons sans difficulté au départ du ruisseau de Ruda par un chemin bien marqué qui serpente à travers les bois.
Le grondement de la rivière, perceptible à quelques centaines de mètres laisse présager un débit important. Ce sera le cas dès la première vasque. Dès les cent premiers nous tombons nez à nez sur le cadavre putréfié d’une vache entrainée par le courant et bloquée par des branchages. Ce qui fait réfléchir ceux qui avaient bu l’eau du ruisseau de Mandriale. Malheureusement, nos photographes nous ayant abandonné, aucune photo ne pourra étayer ces affirmations. Le débit impressionnant de certaines cascades nous impose à installer des rappels guidés ou à contourner les obstacles en désescalade. Le site très encaissé est vraiment magnifique mais l’eau est très froide et certains, grelottant, se mordent les doigts de ne pas avoir une combin. d’au moins 5mm. L’équipement mono-point au départ de quelques mains courantes ou relais nous font regretter de n’avoir pas emmené le perfo. La sortie se fera par une échappatoire très pentue en rive gauche permettant de rejoindre le très beau sentier pavé de la Scala Di Sta Regina et la D84. Très belle sortie assez engagée.
Pour la dernière journée de canyon, le ruisseau de Falconaia, arrive à seulement 500m de celui de Ruda mais présente un profil totalement différent. Une fois de plus, l’accès se fait à travers le maquis, en montant en rive droite vers un poteau électrique pour rejoindre un chemin qui descend vers le départ du canyon. Après un petit saut, ce canyon très vertical et peu aquatique commence par une C15 suivie immédiatement par une C42. Puis un bloc coincé cache une cascade de 18m en deux parties (C12 et C6) qui arrive au sommet d’une C21. Le canyon s’ouvre progressivement pour déboucher au sommet d’une magnifique C70 fractionnée au sommet de laquelle nous pouvons apercevoir la route très loin en contrebas. Enfin, une C25 un peu plus arrosée qui se jette dans une belle vasque achève ce merveilleux parcours. Les roches multicolores qui bordent ce défilé semblent sculptées et le granite poli par les eaux brille au soleil corse.
La soirée sera consacrée aux commémorations habituelles du 8 mai sans dépôt de gerbe…
Le dernier jour. Rangement des bungalows, tri du matériel, farniente, baignade sur la plage de St-Florent, ballade sur le sentier des douaniers occuperont cette dernière journée en Corse avant le retour vers la métropole. Une soirée pizza est improvisée sur la plage de la Marane jusqu’à la tombée de la nuit puis le groupe se sépare, chacun sa vie, chacun son destin, les uns s’envolant vers Nantes, d’autres le lendemain matin par avion de Calvi ou en bateau vers Marseille.
Une première semaine de canyon en Corse qui passe trop vite et donne envie de revenir plus longtemps. Sortie du film à l’automne, on recrute un producteur, un scénariste et un monteur !
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